Lettre d'amour : 64. Lettre à Pierre (Anonyme)

Mon amour,

Je sais que la période est compliquée et que je ne dois pas représenter grand chose pour toi dans cet abîme.

J'aurais tellement voulu te voir aujourd'hui mais tu sembles ignorer mes signaux. Tu ne me regardes plus, ne me salues plus sans que j'en connaisse la raison. T'ai-je blessé ?

Tu ne sais pas que je t'appelle "mon amour" quand tu n'es pas là. Tu ne sais pas que j'attends que tu me croises au coin de la rue pour me proposer un café ou marcher ensemble.

Parfois, je sens encore ton parfum sur le pull que tu m'as donné quand j'avais froid. Véritable chevalier immaculé, tu as des égards pour chacun sans rien attendre en retour. Sans même te douter des sentiments que tu fais naître.

Tandis qu'une fois, tu as laissé tomber ton journal intime, où tu notais toutes tes remarques. La tendresse dont tu manques, la rigueur que tu t'imposes chaque jour, cette femme que tu y décris avec des courbes harmonieuses, un beau visage, des cheveux de soie et un regard profond. Étrangement, elle me ressemblait.
Les mois défilent...

Cet été, je camperai au bord de la Garonne en me demandant "Et si c'était moi qui aurait dû faire le premier pas ?", pensive et pleine de regrets...

Je regarderai le ciel d'été étoilé en ressassant les souvenirs du temps où on était en coloc.

J'observe Paloma et Sophie regretter ces hommes qu'elles n'ont pas su aimer en retour, Gracien et Martial. Problème de timing. Je les plains sincèrement de ne plus être aimées comme elles l'étaient et d'être pleines de regrets.
"Could Have Been Me" du groupe The Struts ou encore "Turn Blue" des Black Keys.

Je referai le monde avec des "Et si ?" en culpabilisant de n'avoir rien fait pour tenter une belle histoire. Et en même temps, je ne savais pas quoi faire, ne sachant pas si tu jouais ou tu étais sincère. Ne connaissant pas vraiment mes atouts, ce que je peux apporter en plus dans ta vie. L'amour ne s'ordonne pas et lorsqu'il est réciproque, il est très rare.

Tes cheveux blonds, tes yeux persans d'un bleu myosotis, une voix grave et des mains de pianiste. Des mains de sentimental qui prodigueraient les caresses les plus délicates et les plus couvrantes sur ma gorge et ma taille. Je me retrouverai aphone avec des jambes de coton, en te regardant, impuissante, me prendre tendrement dans tes bras.
Comme la petite sirène.

C'est pour ça que je continue d'écrire régulièrement ce que je ressens, parce que je culpabilise d'aimer quelqu'un qui était peut-être simplement protecteur et bienveillant au point de prévoir la brique de lait qui me manquerait ou de me coucher le soir quand je rentrais de soirée. M'écouter quand je me plaignais ou encore organiser mon anniversaire surprise. Tes petits yeux tendres me toisaient. Ou peut-être que c'est ce que je veux croire.

Je ne veux pas rester dans cet état d'attente et avoir l'impression de quémander ton attention. De m'illusionner pour rien. Tu restes dans un coin de ma tête.


Je t'aime mon amour.

Je t'aime.

C.