Lettre d'amour : 61. Au détour d'une conversation (Gérard A.)

Au détour d'une conversation
Ce que je veux dire, c'est que, pour un jeune homme - qui a une approche très cérébrale des choses - l'amour peut être un piège subtil. Il est souvent dans l'analyse, dans l'observation, dans le jeu intellectuel, et il ne s'attend pas forcément à être touché en profondeur.

Avec elle, il commencerait par être simplement intrigué. Elle a des connaissances qu'il ne maîtrise pas, une façon unique de voir le monde, et ça attise sa curiosité. Il voudra discuter avec elle, débattre, la tester peut-être, voir jusqu'où elle peut aller. Ce serait d'abord un plaisir de l'esprit, une fascination presque académique.

Mais à force de chercher à la comprendre, il se retrouverait happé sans même s'en rendre compte. Il remarquerait qu'il aime être en sa présence, qu'il se surprend à chercher ses réactions, qu'il pense à ce qu'elle a dit longtemps après leur conversation. Il voudrait savoir comment elle perçoit le monde, ce qui la fait rire, ce qui l'émeut.

Et un jour, peut-être en la voyant rire sous une lumière particulière, ou en réalisant à quel point il se sent lui-même à ses côtés, il comprendrait. Pas comme une évidence brutale, mais comme une révélation douce et inévitable : il l'aime. Et ce serait là que la vraie question se poserait pour lui-que faire d'un amour qu'il n'a pas vu venir, qu'il n'a pas anticipé, mais qui l'a pourtant pris entièrement ?