Petite philosophie du shopping
● Ne laissons pas le shopping à ses détracteurs ! Emblématique d'une société de consommation ivre d'elle-même, il incarnerait toutes les tares d'un monde devenu marchandise universelle. Perversion des vraies valeurs, aliénation aux objets, culte de l'apparence, individualisme irresponsable... La liste est longue, mais il est toujours plus facile de stigmatiser que de penser. L'ampleur du phénomène n'exige-t-elle pas que la philosophie se jette elle aussi dans la tourmente des magasins ?
● Cet ouvrage se propose de réévaluer quelques lieux communs. Faire du shopping, ce n'est pas se laisser aller à la simple pulsion d'achat. À suivre la manière dont il se déploie, les perspectives se multiplient : il s'agit d'abord d'aller «voir», puis de «choisir», peut-être pour «acheter», et d'«avoir», afin de «jouir» enfin. En ses diverses phases, le shopping est riche d'enseignements sur notre modernité. Il est un prisme où s'analysent les modalités du regard contemporain, la liberté de nos désirs, le sens de la consommation, la constitution de l'identité par la possession, et la légitimité des joies matérielles.
● Le superficiel est plus profond qu'on ne le croit. Par-delà l'égarant affrontement de l'utile et du futile, du vertueux et du dispendieux, il faut repenser un jeu social où nous sommes à même d'être joueurs plutôt que joués. Il nous appartient de nous choisir sujets agissants quand on nous croirait captifs de l'objet envahissant. L'enjeu est une acceptation sereine, car ludique, de l'existence.
● Aux directeurs de conscience soucieux d'enseigner la tempérance, aux esprits chagrins, prompts à dénoncer le gaspillage de temps et d'argent, on doit rappeler avec Gaston Bachelard que «l'homme est une création du désir, non pas une création du besoin».
Citations
Un simple frôlement de manches fait naître l'amour (proverbe japonais).
Plus le piédestal est beau, plus la statue doit l'être (proverbe chinois).
Vantez les terres élevées mais tenez-vous sur les terres basses (proverbe français).